Le cas de Jean Ernst Muscadin, commissaire du gouvernement de Miragoâne, soulève de profondes questions sur la gestion de l’Etat de droit en Haïti. Considéré par certains comme un « héros populaire » pour sa lutte directe contre les criminels, d’autres le voient comme un agent hors-la-loi bénéficiant de la protection de l’appareil gouvernemental. Sa méthode, qualifiée d’expéditive et de brutale, divise l’opinion et met en lumière les contradictions flagrantes du pouvoir en place.
D’un côté, Muscadin est perçu comme un symbole de fermeté dans une société en proie à l’insécurité. Ses actions, relayées massivement sur les réseaux sociaux, le présentent comme l’homme qui agit là où l’Etat reste impuissant. Dans un Haïti où la violence des gangs est une menace quotidienne, l’image d’un commissaire qui n’hésite pas à prendre les armes séduit une partie de la population. Pourtant, ces actes, que certains qualifient d’exécutions sommaires, posent la question du respect des droits fondamentaux.
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Le soutien tacite du gouvernement, illustré par l’absence de sanctions à son encontre, contraste avec la rigueur avec laquelle d’autres fonctionnaires dans des situations similaires ont été traités. Par exemple, James Jean Louis et Wadson Azor, respectivement commissaires du gouvernement des Cayes et des Côteaux, ont été rapidement relevés de leurs fonctions pour des infractions relativement mineures. Muscadin, quant à lui, reste intouchable et jouit d’une impunité qui met en évidence une justice à deux vitesses.
Cette impunité est d’autant plus frappante que Muscadin ne se contente pas de mener des opérations controversées. Il les glorifie publiquement en les relayant sur les réseaux sociaux, au mépris des directives du Premier ministre Garry Conille. Cette sortie publique non autorisée témoigne d’une rébellion contre le contrôle du gouvernement central, mettant en lumière une dangereuse autonomisation des acteurs locaux de la justice.
Au-delà de Muscadin, cette situation révèle une crise institutionnelle plus profonde. L’État haïtien semble impuissant à faire respecter ses propres lois, laissant les individus agir en dehors du système judiciaire. La justice, pilier fondamental de toute démocratie, est ici remise en cause. En fermant les yeux sur ces pratiques, le gouvernement renforce l’idée que l’Etat de droit souffre en Haïti.
En conclusion, Jean Ernst Muscadin incarne à la fois la frustration d’une population désespérée par l’insécurité et les dérives d’un Etat incapable d’assurer une justice équitable. Héros pour les uns, hors-la-loi pour les autres, son cas symbolise le difficile équilibre entre justice et vengeance dans un contexte de crise profonde. La question reste posée : Haïti peut-elle encore prétendre être un État de droit quand ceux qui sont censés l’incarner le bafouent ?