La lutte contre la corruption est un slogan universellement adopté par les grandes puissances, souvent présenté comme un pilier de la démocratie et de l’État de droit. En Haïti, cependant, cette rhétorique ressemble à un vœu pieux. Chaque jour, nous, citoyens haïtiens, observons avec indignation et désillusion une réalité bien différente : les représentants des nations qui se targuent de défendre la probité se compromettent dans des alliances douteuses avec les personnalités les plus controversées de notre paysage politique.
Comment expliquer, par exemple, que des ambassadeurs d’Etats influents – Etats-Unis, France, Canada, pour ne citer qu’eux – s’affichent aux côtés de dirigeants notoirement corrompus, cautionnant leurs actions par leur présence officielle ? Lors de cérémonies d’investiture ou de nominations à des postes stratégiques de l’administration publique, leur participation envoie un message inquiétant : la corruption peut être tolérée, voire acceptée, si elle sert certains intérêts géopolitiques.
Dennis B. Hankins, Ambassadeur des Etats-Unis, M. Antoine Michon, Ambassadeur de France, et M. André François Giroux, Ambassadeur du Canada, une question s’impose : dans quel monde les principes moraux et l’intégrité deviennent-ils optionnels lorsqu’il s’agit d’Haïti ? Vos pays se présentent comme des modèles de gouvernance et d’éthique, mais vos actions sur le terrain semblent dire tout le contraire.
En Haïti, la corruption n’est pas seulement un problème interne ; elle est alimentée par une complaisance internationale qui piétine les aspirations du peuple haïtien à un avenir meilleur. Lorsque des institutions puissantes ferment les yeux sur les actions de ceux qu’elles soutiennent, elles ne sont pas seulement complices, elles participent activement à la perpétuation du système.
Que signifie donc réellement lutter contre la corruption ? S’agit-il d’un principe fondamental ou d’un simple outil diplomatique, modulable en fonction d’intérêts stratégiques ? Le peuple haïtien mérite une réponse claire et surtout une action cohérente. Il est temps que ceux qui se positionnent comme les alliés de notre développement se montrent dignes de la confiance qu’ils exigent. Car pour nous, Haïtiens, chaque trahison des idéaux qu’ils proclament aggrave notre sentiment d’abandon et d’injustice.
En définitive, ce n’est pas seulement la corruption des élites locales qui détruit Haïti, mais aussi l’hypocrisie et la complicité des puissances étrangères. La populaire haïtienne exige non seulement des discours, mais aussi des actes conformes aux valeurs qu’elles prétendent défendre.