Le lundi 14 avril 2025, le Conseil présidentiel de transition a adopté un budget de 36 milliards de gourdes, avec une promesse ambitieuse : rétablir la sécurité publique dans un pays ravagé par l’insécurité et la violence armée. Selon les chiffres officiels, 37% de ce budget sera consacré au renforcement des forces de l’ordre – police, armée, services de renseignement et équipements spécialisés. Parallèlement, 17,24% seront consacrés au développement et à la sécurisation de la bande frontalière, censée incarner un meilleur contrôle territorial.
Sur le papier, ces décisions semblent louables. Haïti a un besoin urgent d’une réponse institutionnelle à la hauteur des défis sécuritaires auxquels elle est confrontée. Mais peut-on sincèrement accorder un quelconque crédit à cette classe dirigeante de transition, dont plusieurs membres ont déjà un lourd passif de mauvaise gestion et de détournement de fonds publics, notamment dans le secteur du renseignement ? Peut-on leur faire confiance pour allouer cet argent dans l’intérêt de la population, alors que des soupçons persistants de corruption pèsent sur leur gestion ?
La question est d’autant plus légitime que la population haïtienne, appauvrie, terrorisée et livrée à elle-même, semble une fois de plus reléguée au second plan. Si les conseillers présidentiels avaient réellement l’intention de rétablir l’ordre, pourquoi n’avons-nous pas encore vu de plan détaillé, de calendrier d’action ou de mécanismes de transparence dans l’utilisation des fonds ? Pourquoi continuer à gérer l’urgence nationale comme une opportunité de business politique ?
Dans un pays où la défiance à l’égard des autorités n’a jamais été aussi forte, le Conseil présidentiel serait bien inspiré de comprendre qu’un budget ne se mesure pas en milliards, mais en crédibilité, en volonté réelle de changement et en transparence. A défaut, les 36 milliards d’euros risquent de disparaître dans les circuits obscurs d’un système déjà gangrené par la corruption, tandis que la population continuera à payer la facture du chaos.