Une vidéo récemment publiée sur les réseaux sociaux jette une lumière crue sur la spirale de violence qui s’empare d’Haïti. A Gressier, dans la banlieue sud de Port-au-Prince, des membres de la coalition criminelle Viv Ansanm célèbrent l’incendie d’un véhicule de police. Mais ce qui choque plus que l’acte lui-même, c’est la présence d’enfants, parfois très jeunes, qui participent à cette célébration macabre.
Quand l’innocence se dissout dans la violence
Ces images d’une brutalité saisissante révèlent une réalité qui fait froid dans le dos : la proximité croissante entre les jeunes et les groupes armés. Pour ces enfants, nés et élevés dans des quartiers où la loi est dictée par des hommes armés, la violence ne suscite plus la peur, mais l’exaltation. Ils applaudissent, rient et participent, comme si le chaos était la norme.
Cette scène illustre le basculement progressif d’une génération, bercée non plus par l’école ou les jeux d’enfants, mais par les codes impitoyables des gangs. Les organisations criminelles, en manque de main d’œuvre adulte en raison des conflits internes et des interventions policières, recrutent de plus en plus de jeunes. L’intégration des enfants dans ces groupes n’est plus seulement une question d’instrumentalisation, mais d’acculturation : ils grandissent dans la guerre, la reproduisent et l’alimentent.
Une spirale difficile à briser
Les causes de cette dérive sont multiples : extrême pauvreté, manque d’opportunités, effondrement des institutions et désintégration du tissu social. L’Etat, affaibli par la crise politique et l’instabilité chronique, peine à offrir des alternatives à ces jeunes coincés entre la misère et la terreur.
Dans ce contexte, l’école, censée être un rempart, est souvent une chimère. De nombreuses écoles ferment leurs portes, victimes d’attentats ou de l’exode massif des enseignants. Des ONG et des initiatives locales tentent de combler les lacunes, mais leurs actions restent insuffisantes face à l’ampleur du problème.
L’urgence d’une action concertée
La présence d’enfants dans cette célébration morbide est préoccupante. Elle appelle à une réflexion sur les solutions à mettre en œuvre pour éviter que toute une génération ne bascule dans l’irréparable.
Il est impératif que les autorités haïtiennes, avec l’appui de la communauté internationale, redoublent d’efforts pour sécuriser les quartiers gangrenés, rétablir l’accès à l’éducation et offrir des alternatives économiques viables. La réintégration des jeunes à risque passe également par des programmes de déradicalisation et de réinsertion sociale, afin de leur offrir une issue autre que les armes et la violence.
Gressier n’est pas un cas isolé. Il est le reflet d’une Haïti où l’enfance se dilue dans l’ombre des gangs. Rompre ce cycle est une nécessité absolue, sans quoi l’avenir du pays restera l’otage de ces forces destructrices.