Dans un pays où l’Etat peine à affirmer son autorité, les gangs font la loi. La dernière démonstration de force du groupe criminel 400 Mawozo, qui a pris possession de l’Académie Camp Nous de la Fédération Haïtienne de Football (FHF), n’est qu’une illustration d’un phénomène plus large : la démission de l’Etat face à l’expansion du crime organisé.
Une confrontation asymétrique
Le week-end dernier, la Police Nationale d’Haïti (PNH) a tenté d’imposer son autorité en détruisant un stand et en confisquant un générateur appartenant à Lanmò 100 Jou, chef du gang des 400 Mawozo. Ce dernier, défiant toute forme de légitimité républicaine, avait annoncé avec arrogance l’organisation d’un carnaval. Cette intervention policière, bien que nécessaire, était plus une opération de communication qu’une stratégie efficace contre le banditisme.
Le lendemain, la réponse des criminels ne se fait pas attendre : en représailles, ils envahissent et prennent le contrôle du Ranch de Croix-des-Bouquets, autrefois sanctuaire d’espoir pour de nombreux jeunes. D’un seul coup, le gang a transformé un centre de formation en un symbole de l’échec de l’État haïtien à protéger ses citoyens.
L’effondrement du rêve haïtien
L’Académie Camp Nous était plus qu’un simple centre sportif. Elle incarnait un idéal, un espoir pour les jeunes en quête d’un avenir meilleur. Sous l’impulsion de la Fédération Haïtienne de Football (FHF), des milliers de garçons et de filles ont trouvé une alternative à la rue, à la violence et à l’insécurité. Aujourd’hui, ce rêve est brisé, piétiné par la brutalité de ceux qui prospèrent dans le chaos.
Ce qui est en jeu ici va au-delà de la simple perte d’une arène sportive. Il s’agit d’une guerre pour l’âme même de la nation. Lorsque l’État perd du terrain face aux gangs, ce ne sont pas seulement les infrastructures qui tombent, mais des générations entières d’Haïtiens qui sombrent dans l’abandon et la désillusion.
L’inaction, complice du crime
Face à cette montée en puissance des groupes criminels, le gouvernement haïtien reste effroyablement impuissant. La Police Nationale d’Haïti (PNH), sous-équipée et souvent livrée à elle-même, fait de son mieux pour contenir une menace qui la dépasse. Mais la question demeure : où est l’Etat ? Où sont les stratégies de lutte contre ces organisations criminelles qui sapent les fondements de la République ?
L’inaction politique ne fait que légitimer la terreur imposée par ces gangs. L’absence de justice et la corruption omniprésente leur offrent un boulevard vers l’impunité. Pendant ce temps, la population, otage d’un système en déliquescence, tente de survivre au milieu de ce chaos institutionnalisé.
Un avenir en sursis
Si rien n’est fait pour enrayer cette spirale infernale, Haïti risque de sombrer définitivement dans un état de non-droit où les gangs dictent leur loi. Restaurer l’autorité de l’Etat ne peut plus être un simple slogan politique, c’est une nécessité vitale pour sauver ce qui est encore debout.
L’occupation de Camp Nous est un signal d’alarme. Mais sera-t-il entendu par ceux qui sont censés garantir la sécurité et l’avenir du pays ? Ou bien Haïti continuera-t-elle à s’enfoncer dans l’abîme, sous le regard impuissant de ses dirigeants ?